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Adieu , À Dieu

Encore un matin où je suis presque surprise de me réveiller. Eh oui, j'en suis là. 

Le pèse-personne refuse d'afficher mon poids, mais je peux lire 00.00. Il doit décider qu'en-decà de 47.00, c'est  inutile.

J'ai découvert à quel point c'est inconfortable d'avoir perdu la graisse sur les fesses, particulièrement dans le bain. Je m'octroie un fond de bain le matin, avec de l'eau bien chaude. Mais que la baignoire est dure ! Auparavant, je m'occupe de mes chiens, avec précaution pour moi, car leurs câlins empressés du matin manquent de me renverser.

Un complément alimentaire en guise de petit-déjeuner, un régal. Je varie les plaisirs : vanille, noisette, chocolat, pêche-abricot, tropical. Et là, peut-être un premier effet de la pesanteur et de la station debout, arrive la douleur.  Imaginons une boule de billard qui presse l'anus et le sacrum. Debout, je suis mal. Assise, non, pas possible plus de 5 minutes. Le masochisme n'est pas mon kiff. D'où l'ajustement de médicaments en plus des patchs de Fentanyl, et le bain. S'en suit  une bonne heure pour rétablir un équilibre précaire et supportable, lovée dans le canapé 🛋,  avec lecture de 📚 ou livre-audio, coussins chauds, bouillottes. Une vraie vie de patachon. C'est surtout que je profite que les chiens digèrent et m'offrent ainsi un calme relatif. Si on est mercredi, ce sont d'autres chiens 🐕  dans le champ en-dessous qui s'excitent sur des lapins 🐰...

La journée suit son cours ainsi, mais avec la frustration de ne même pas pouvoir m'asseoir à mon bureau. Donc pas d'écriture. Mes pouces travaillent davantage désormais, car écrire sur le téléphone, ça reste possible.

Je sens bien que mes forces s'amenuisent de jour en jour. Nourriture liquide exclusivement, transit au ralenti, je vais moi aussi passer à l'heure d'hiver, puis en mode hibernation. Sauf qu'il n'y aura pas de réveil.

Parfois, j'ai des palpitations.  C'est écrit dans les notices médicales, avec une ribambelle d'effets secondaires. Mon petit cœur ❤ est solide, je l'ai musclé de mon amour pour mes chers et tendres, il ne me fera peut-être pas faux-bond. Quoique s'il manque quelques battements de temps en temps, l'affaire est dans le sac (mortuaire😉). Cela éviterait l'épisode des soins palliatifs en clinique et de l'attente, celle qui est surtout insupportable pour ceux qui restent. Et qui guettent le dernier souffle de vie. Je me souviens avoir vécu cela il y a tout juste 5 ans aujourd'hui,  en regardant mon père s'en aller.

Ainsi va désormais le reste de ma vie. Je craque seule la plupart du temps. Parfois, je dis que j'ai besoin de pleurer un peu. Même si je ne suis pas seule.

Je reçois des visites de personnes formidables, mais ça aussi, je pense que je vais devoir ralentir.  Malgré le plaisir, c'est trop éprouvant physiquement et émotionnellement,  sauf Celle qui est là toute proche, disponible, et qui se reconnaîtra. Avec elle, je peux parler de tout, à  coeur ouvert, du choix des vêtements,  des tarifs des pompes funèbres. Elle accepte mes conversations pour l'après,  ce que ne peuvent pas encore entendre mes chers et tendres.

Samedi dernier,  j'ai eu la joie de me promener en fauteuil roulant : mettre le nez dehors, être caressée par les rayons de soleil.  J'espère pouvoir y goûter à  nouveau ce week-end.  

Mais surtout, depuis mes dernières nouvelles, j'ai vu mon dernier fils fêter ses 20 ans ! Et j'ai réussi à souffler mes 52 bougies !

Voilà, je vais continuer à me reposer.  De quoi ? J'ai dû en faire, des choses,  dans ma vie, pour prétendre à  tant de repos !

Mes enfants m'ont écrit des mots formidables. Ils me disent de si belles choses. C'est un privilège de pouvoir se dire au revoir ainsi, tout tranquillement.  Je le ressens d'autant mieux que je n'ai pas eu le temps de dire au revoir à ma mère, victime d'un infarctus quand j'avais 31 ans. 

Mes trois fils sont maintenant des hommes solides. Je suis fière d'eux et je remercie Rémy, mon rocher, de les avoir menés jusque-là avec moi.

J'ai des amis et de la famille à remercier mais je le fais en direct.

Merci aussi aux personnes qui m'ont soutenue dans leurs commentaires.  Je n'aurai peut-être pas la force de répondre désormais.  Mais les mots les plus simples peuvent apporter beaucoup de chaleur.

Mes chers et tendres, il va falloir me laisser filer bientôt. Chacun retournera à sa vie. C'est ainsi. N'ayez pas de colère. Je sais, on était bien tous les 5. Vous avez tant de choses à construire, des projets à mener, des 💕 à choyer. Ça va aller. Vous verrez, ça va aller. ❤

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