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Naufrage

Aujourd'hui,  jour de chimio. Au cours de ma navigation sur Facebook, j'ai particulièrement apprécié un texte écrit par Yves Depouilly, patient du groupe lié au cancer dont je fais partie. 

Le  voici ci-dessous avec son accord.


Un grand homme (1m96 sans le képi) disait : « la vieillesse est un naufrage ».


Un petit homme (1m80 sans les talons aiguille) le paraphrase sans vergogne aujourd’hui : le cancer est un naufrage.


Première analogie : tout comme dans un naufrage, on peut être malheureuse victime… ou chanceux rescapé. 


Dans les deux cas, l’événement est soudain, imprévu, souvent violent, et bouleverse celles et ceux qui le subissent.


Les causes peuvent en être multiples :

-Je cherche des glaçons pour mon whisky = Titanic. 

-Ié vais fairé coucou à la Bella ragazza = Costa Concordia. 

-C’est qui le chef ici! = la Méduse. 

-Parce que! = le Pourquoi Pas, etc.


Très souvent le cancéreux naufragé hésite, tâtonne, reçoit ordres et contrordres, conseils, consignes, recommandations diverses et variées sans savoir lesquelles écouter et suivre :

-Allez sur le pont supérieur!

-Allez sur le pont inférieur!

-Sautez dans l’eau!

-Attendez dans votre cabine, on est en train de mettre des rustines. 

-C’est vous qui jouez des maracas? L’orchestre vous attend sur le pont pour jouer « plus près de toi mon Dieu », etc.


Il finit par faire un choix, en croisant les doigts pour que ce soit le bon. Radio, chimio, chirurgie, anticorps… Il s’épuise, se vide de son énergie en essayant d’échapper aux flots tumultueux qui lèchent la coque éventrée avec gourmandise…


Il réussit enfin à se faire une petite place tout au bord de la chaloupe de la vie, respire, souffle, esquisse un début de sourire… et schplaf! Une grosse lame l’éjecte du cannot et l’entraîne vers le fond : récidive! 


Il se croit perdu, voit déjà les sirènes aiguiser leurs couteaux pour se tailler un bon beefsteak d’homme dans le filet. En désespoir de cause, il donne un bon coup de mollet et remonte à la surface où il aspire goulûment une grande bouffée d’air. Une main bienveillante se tend et le hisse dans le cannot : guérison!


Autour du cannot, hélas! Flottent les dépouilles de celles et ceux qui n’ont pas survécu.


Ils n’ont fait ni plus ni moins, ni mieux ni moins bien que lui, simplement leur heure était venue…


Oui, le cancer est un naufrage. Et tout naufrage est une immense épreuve… et une des aventures les plus intenses d’une vie. Qu’il finisse bien ou mal, il laisse toujours des marques indélébiles, physiques, morales, chez ceux qui le vivent. 


Des mains, parfois inconnues, se tendent vers vous pour vous sauver. Les émotions, parfois contradictoires, sont portées à leur paroxysme. Chaque minute passée hors des flots en furie est une victoire, chaque pas qui nous éloigne de la noyade une superbe avancée.


Je souhaite de tout cœur à chacune et chacun d’entre vous de voir votre nom inscrit en gros et pour toujours sur la liste des rescapés. Bon vent! 😊😘

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