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Matin gris

Il est de ces matins où je n’ai pas envie. Parce que je me sens mal, fatiguée, sèche, les yeux lourds, la peau ridée et cartonnée, les doigts crevassés, encore des cheveux sur l’oreiller. Je suis déplumée. Je sais que je vais bouger et que je vais avoir envie de me gratter. Je vais cogner mes doigts ouverts et souffrir. Faire tomber des objets.
Il va pourtant falloir se faire violence. Sortir du lit. Une douche va résoudre pour quelques minutes les problèmes physiques, mais je ne peux pas m’éterniser et laisser l’eau bienfaitrice couler indéfiniment sur ce corps qui me trahit petit à petit. Si ce n’est pas aujourd’hui, ce sera peut-être demain ? Et si, pour un temps, le corps va mieux, il va falloir soigner mon vague à l’âme ce matin.
S’habiller. Prendre ma peine à bras le corps et décider que non, je ne vais pas passer la journée comme ça. Se secouer. Descendre au rez-de-chaussée et recevoir en pleine face la vivacité de mes deux chiens qui, quoiqu’il arrive, sont fidèles au rendez-vous de leur bondissant accueil du matin : ils sont heureux de me retrouver, surtout la petite qui n’a que dix mois, donc il faut que je me coule dans cet élan d’amour, que je me laisse embarquer et voilà, c’est aussi simple que ça. Prendre une partie de cette énergie de vie et la faire mienne. Leur rendre leur bonne humeur. Aide précieuse. Facilitateurs de bonheur.
Ne pas se laisser envahir par l’air du temps. Le temps qu’il fait, gris et frais. On nous promet du froid pour la fin de semaine. L’air du temps que la radio nous déverse. Ne pas écouter les infos ? Peut-être. Ne faudrait-il pas simplement écouter de la musique, gaie de préférence ? Aujourd’hui, je ne vais pas pouvoir prendre et supporter ma part de la misère du monde. Ne pas m’imposer cela. Je vais faire un jeûne médiatique. Une purge de mauvaises nouvelles. Ne chercher que la vie et le beau qui m’entourent. Dommage, il fait toujours gris dehors. Mais après tout, je ne suis pas encore sortie : peut-être qu’en scrutant le ciel je trouverais un coin de bleu ? Retrouver la paix, retrouver la vie, l’essentiel. Toujours y croire. Y croire encore aujourd’hui. Poursuivre la route. Un jour après l’autre.
À chaque jour suffit sa peine. Revenir toujours à cela. L’essentiel. La vie.

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