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Chanceuse

Pourquoi cette photo d’une fleur d’aloe vera ? Parce que je suis chanceuse. J’ai déjà eu une fleur en mai, et une autre plante m’en offre une aujourd’hui. Il paraît que l’aloe vera fleurit très rarement. C’est sympa, cadeaux de la première plante que j’ai achetée il y a trois ou quatre ans, j’en ai fait des dizaines de boutures qui sont parties dans tout plein de foyers. Et moi, j’ai eu la chance d’avoir deux fleurs cette année.

C’est vrai que dans ma vie, j’ai toujours été chanceuse. D’avoir les animaux que je souhaitais avoir auprès de moi. De rencontrer mon chéri. De construire avec lui notre famille comme nous le souhaitions, ensemble. Comme dirait mon amie de fac Delphine, au moment où je l’ai retrouvée, il y a quelques années : « Quand j’ai connu Janick, elle avait tout programmé : le mariage, deux enfants biologiques, un enfant adopté, la maison, etc. » Excuse-moi, Delphine, si ce ne sont pas exactement tes paroles, je perds sans doute un peu la mémoire, mais le sens est là, n’est-ce pas ? Oui, du bol. Anecdote en forme de cerise sur le gâteau de la vie, quand nous étions en procédure d’adoption, il se trouve que nous étions aussi en train de vendre notre première maison à Soucieu-en-Jarrest (que nous avions eu la chance d’acheter bien jeunes), et les acquéreurs se sont trouvés être un couple mixte, habitant à Ouagadougou, au Burkina Faso, là même où notre dossier attendait depuis déjà quelques semaines que l’on nous attribue un enfant. C’est donc chez eux que j’ai séjourné quand je suis allée par deux fois à Ouaga, quelques mois plus tard, pour faire la connaissance de Noé et le ramener chez nous.

Quelle chance, mes trois grands et beaux garçons ! Quelle chance d’avoir choisi mon premier métier, puis le second ! De vivre à la campagne ! D’être entourée, aimée !

Le cancer depuis neuf ans n’est pas une chance. Mais cette longue épreuve me permet depuis tout ce temps qu’il est là, comme un caillou dans ma chaussure, d’avancer quand même et surtout, de regarder souvent par-dessus mon épaule pour considérer, admirer, sourire à tout ce que nous avons construit. Tout le chemin parcouru est un vrai chemin heureux. J’ai été soignée, opérée 6 fois, j’ai fait des séjours en hôpital ou clinique qui se sont toujours bien passés, j’ai surmonté 118 cures de chimiothérapie. Je suis toujours debout.

Aujourd’hui, le cancer se met à son aise. Mon corps va me lâcher. Peut-être un essai thérapeutique, si j’arrive à l’intégrer, me donnera-t-il un sursis supplémentaire. Peut-être, sinon, quelques nouvelles chimios en réintroduisant une molécule qui avait marché précédemment avant que mon corps ne s’y habitue et qu’elle devienne inefficace. Je vais tout faire pour que mon esprit continue à surmonter les épreuves et tenter de vivre le temps qui reste le plus sereinement possible et surtout toujours dans la joie.

 

Non, le cancer n’est pas une chance, mais savoir que l’on va mourir, comme nous le savons quand on traverse ces épreuves, en est presque une. Car nos yeux et nos sens sont grands ouverts, nous ne sommes plus la même personne et nous savons mieux nous rendre heureux de moments simples. 

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