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Communication

Communiquer aujourd'hui avec une personne dite « malade », atteinte d'un cancer : ce n’est pas si simple, à moins de parler avec le cœur.

 

C'est souvent recevoir un SMS plutôt qu'un coup de fil : « Voilà, c'est fait, je n'ai pas eu à lui parler, à trouver les mots, elle lira mon SMS. Je ne serai pas pris au dépourvu au détour d'une phrase. Et puis, si jamais elle se plaint, je n'aurai pas à l'entendre ».

 

C'est parfois recevoir un coup de fil, vite fait. La personne vous appelle, mais vous voyez bien qu'elle n'est pas vraiment avec vous. Elle est en voiture, du coup, elle gagne du temps. Ou bien elle est dans sa cuisine, elle vide son lave-vaisselle, elle fait cuire un truc, vous entendez le bruit des casseroles. C'est tellement chouette le portable qui permet de faire plusieurs choses à la fois. C'est faire les choses à moitié, sans réelle conscience de ce que l'on fait. On croit que l’on gagne du temps. Finalement, le résultat n’est pas satisfaisant. La qualité de la communication n’y est pas.

 

Plus rarement, la personne prend le temps d'une vraie communication : elle est assise dans son canapé, elle n'est pas occupée à autre chose. Elle est juste là pour vous. Elle ose vous poser des questions sur le traitement que vous suivez, sur les effets secondaires. Elle est au bout du fil, mais c'est comme si elle vous regardait en face, vous, la personne atteinte d'un cancer que vous êtes. Elle ne craint pas de vous entendre. En fait, si elle vous connaît bien, elle sait qu’elle ne prend pas vraiment de risques, car d'une manière générale, vous ne vous plaignez pas ; mais on ne sait jamais, une faiblesse peut arriver.

 

Depuis 2013 que je suis cette personne « atteinte d'un cancer », j'ai vu évoluer la communication envers moi. Des personnes se sont éloignées. D'autres sont carrément parties. Et je sais apprécier aussi que certaines personnes se soient rapprochées. Pourtant, le cancer n'est pas contagieux. Je ne me plains pas, je ne suis pas devenue aigrie, je ne suis pas devenue triste. Je m'efforce de faire bonne figure. J'ai changé, aussi. Je suis devenue sans doute plus attentive aux autres, j'ai plus d'écoute et d'empathie. Je suis joyeuse et heureuse. J'ai saisi la valeur du temps qui passe. Ceux qui sont partis ne le sauront jamais, c'est dommage pour eux !

 

Parler à une personne atteinte d'un cancer, j’admets que ce n'est pas forcément facile au début parce que l'on ne sait pas comment elle vit la situation. Alors on se prend la tête à savoir si l’on peut poser des questions, et lesquelles. Par conséquent, il arrive que l’on renonce. Je pense qu'il faut essayer de rester naturel et dans la relation que l'on avait précédemment. Ne pas couper les ponts. Il faut faire cet effort, parce que la « malade » en sera heureuse.

 

Citation attribuée à Jules Verne, mais je n’en ai pas trouvé la source, ce qui n’empêche pas de l’apprécier : « Car, à toute heure du jour et de la nuit, la distraction est là, à portée de bouton, de clavier ou de télécommande, qui vient faire écran à la pensée. Peut-être ne s'agit-il, après tout, que d'une simple affaire de prolifération : à force de se singer, de s'autocélébrer, à force de promouvoir la vétille comme épopée du genre humain, les formes modernes de la communication se transforment en une vaste polyphonie de l'insignifiance. »

Jules Verne

 

 

Et « Communiquer ! Le grand mot, mais comme on en abuse ! Il signifie donner : on en fait le synonyme d'échanger. », Charles-Ferdinand Ramuz.

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