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Jour de peine

Aujourd'hui, c'est jour de peine. J'ai reçu mes résultats de prise de sang et j'aurais pu faire mieux. En quatre mois, mon ACE a doublé.
J'ai fait cette prise de sang avec appréhension vendredi et je n'ai reçu le résultat que ce matin. Je soupçonne l'infirmière qui m'a prélevée d'avoir ralenti les résultats, car je lui avais confié que cela me souciait et elle m'a dit qu'il ne fallait pas que cela m'attriste pendant le week-end. Oui, ce week-end, j'ai réussi un peu à oublier tout ça. Qu'elle l'ait fait ou pas, c'est bien ainsi.
Tout à l'heure, après avoir ouvert le mail du labo, je n'arrivais plus à travailler : j'entendais dans mon casque ce que mes doigts devaient transcrire, mais mon esprit continuait de ruminer tout ça. Alors j'ai mis l'ordinateur en veille et nous sommes partis nous promener, Moka et moi. Histoire de pleurer tout mon soûl, de trouver de l'énergie pour ce qui m'attend peut-être.
Alors c'est où que ça ne marche pas ? Les ganglions, les poumons, le péritoine ? Un autre organe ? Lequel serait le moins pire ? Je n'ai pas couru depuis longtemps. Alors comme une gamine, pour me rassurer, j'ai couru quelques dizaines de mètres comme pour tester mes poumons : oui, je peux encore le faire !
Aujourd'hui, c'est jour de peine. Demain, j'aurai les réponses car je passe un petscan. Comme tous les trois mois. J'aurai peur, mais à la fin, je saurai. Et jeudi, c'est consultation. Ma doc m'a dit à la dernière chimio que oui, elle avait (encore) des solutions. J'ai hâte d'entendre ça ! Que mes nuits vont être lourdes de pensées !
Il y a quelques semaines, je pensais au temps qui reste, un an, deux ans, cinq ans... plus si affinités ! Et j'ai réalisé que demain peut être la fin, il suffit que je fasse un AVC, un infarctus, une mauvaise chute dans les escaliers, pire, un accident de la route. On oublie que cela peut arriver demain, même aujourd'hui. Ce soir ou dans cinq minutes.
Demain, je saurai. Ce sera encore beaucoup de peine, mais j'espère que comme chaque fois depuis huit ans, je vais me relever et ce sera des jours de rage. De la rage qui déborde de toute part, pour encore gagner du temps. Ce temps, quand on a la rage, on cherche à le transformer en belles choses, à donner à voir à ses proches : faire des efforts pour présenter un visage souriant, plaisanter et vivre à 200 % pour ne rien regretter. Je me suis laissée aller ces derniers temps à dormir beaucoup, peut-être aussi une question de saison et de lumière : je vais arrêter de dormir pour vivre plus, remplir des heures de 120 minutes. Je vais orienter mon esprit pour penser positivement : j'aurais pu être malheureuse, perdre un enfant, ou pire, le voir souffrir. J'aurais pu devoir affronter bien d'autres épreuves. J'aurais pu naître ailleurs, ne pas être prise en charge aussi pleinement, ne jamais rencontrer mon Rémy. J'ai tellement été gâtée jusqu'à présent !
J'attends la rage, mais je laisserai toujours de la place à la joie et au bonheur. C'est mon défi.
Jusqu'ici, tout va bien.

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