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être adulte

Qu’est-ce qu’être adulte ? Quand devient-on adulte ? Est-ce que la maladie rend « plus » adulte ? Ce sont trois questions qui me sont venues à l’esprit il y a quelques jours. Allez savoir pourquoi !

D’abord, la définition. Le Larousse nous dit : « Qui est parvenu au terme de sa croissance, à son plein développement. Qui fait preuve d'équilibre, de maturité (par opposition à « infantile »). Exemple : Un comportement adulte. »

Il y aurait donc dans la vie deux états : ce qui est en croissance biologique, donc l’enfant ; ce qui n’est plus en croissance : l’adulte. Dans les années 70, le psychanalyste Tony Anatrella a créé le terme « adulescent » pour désigner des « adultes de tous âges qui s’infantilisent et vivent un prolongement interminable de l’adolescence ». Une sorte de troisième état ?

André Comte-Sponville écrit dans « La vie humaine » en 2010 : « Il n’y a pas de grandes personnes. Il n’y a que des enfants qui font semblant d’avoir grandi, ou qui ont grandi, en effet, mais sans pouvoir y croire tout à fait, sans parvenir à effacer l’enfant qu’ils furent, qu’ils demeurent, qu’ils portent en eux ou qui les porte… Être adulte, c’est un rôle de composition. » et « C’est quelqu’un qui a renoncé au bonheur, en tout cas à celui qu’il espérait à seize ans, qui n’y croit plus, qui ne s’y intéresse plus, du moins pour lui ou les gens de sa génération, mais qui ne peut s’empêcher, s’il a des enfants, de le rêver pour eux, de l’espérer pour eux, follement, anxieusement, désespérément… Cette inconséquence est belle. C’est notre part de folie. C’est notre part de passion. C’est notre part d’enfance, là encore, mais projetée, à cœur perdu, dans une autre… Puis les enfants grandiront et feront des enfants. Tout continue. Tout continuera. Le secret est bien gardé, même quand on le divulgue. Ce n’est pas qu’on mente. Ce n’est pas qu’on se taise. C’est qu’on ne peut accepter, pour ses enfants, ce qu’on a mis tant d’années à comprendre pour soi, à accepter à peu près pour soi, à surmonter, le plus souvent, presque joyeusement… Un adulte ? C’est quelqu’un qui a appris à durer et à endurer, mais qui ne se console pas, s’il a des enfants, que ceux-là doivent l’apprendre à leur tour.

Cela ne l’empêche pas de vivre. Cela ne l’empêche pas d’aimer, et pas seulement ses enfants. Cela ne l’empêche même pas d’être heureux, parfois, à sa façon, d’être plus ou moins heureux, ou presque heureux, disons de n’être pas malheureux. Cela ne l’empêche pas d’exister et d’insister, de durer et de perdurer. L’homme de 40 ans, l’homme de 50 ans, l’homme de 60 ans… On sait bien comment cela finira. Mais ce n’est pas la fin qui importe. C’est le chemin. C’est le travail à faire. C’est l’amour à donner. C’est la vie qui continue, qui ne veut pas mourir, qui ne veut pas renoncer… »

Je trouve que c’est un jugement bien rude de l’âge adulte. Bien sûr, nous sommes faits de ce que nous étions enfants, nous portons l’empreinte des événements qui sont intervenus dans notre vie jusque-là. Mais j’aime la fin de son propos, c’est bien le chemin qui compte et l’amour à donner.

« Être adulte, c'est avoir pardonné à ses parents. », selon Goethe. Pour Jean Rostand, « Être adulte, c’est être seul ». Comment interpréter ces deux assertions ? Je comprends qu’être adulte, c’est se dégager de l’emprise que nos parents exerçaient, pourraient avoir exercée ou exerceraient encore sur nous, encore faut-il en avoir conscience. De quelle emprise s’agit-il ? Si être devenu adulte, c’est être seul, je comprends que c’est penser par soi-même, sans se soucier de ce que d’autres (des parents, des amis ?) penseraient de nos choix et de nos actes. Là, je pense particulièrement à un jeune homme de 21 ans devenu végan, qui a pris le parti de ce chemin de consommation selon des arguments qu’il a choisi de croire et qu’il partage volontiers, une profonde conviction que ce choix peut faire partie de la solution pour « sauver la planète ». Il n’a pas besoin de sa mère qui, au passage, le comprend et le respecte, pour assumer ce choix.

Est-ce que la maladie rend adulte ? « Plus » adulte ? Je pense que la maladie, quand elle arrive par exemple à 42 ans comme ce fut mon cas, peut surtout nous amener à reconsidérer tout notre système de pensées et nous invite très souvent à la réflexion. Devenir patiente au sens de dépendre des décisions de mon médecin oncologue, c’est aussi adopter une autre relation au temps, et ça commence par être réellement patiente, au sens d’avoir de la patience, dans les salles d’attente, dans le parcours de santé, dans l’attente des résultats. Laisser le temps au temps, profiter du temps, voir chaque jour le temps comme un allié qui nous donne à goûter plus intensément les secondes vécues avec les personnes qui comptent vraiment, pour bien vivre le temps qui reste.

 

Qu’en pensez-vous ? Quelles seraient vos définitions ?

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